Le 23 juin 2025, le Bénin a franchi une étape déterminante dans la lutte contre le paludisme avec le lancement officiel du Caucus des parlementaires pour l’élimination du paludisme. Un acte politique fort, dans un contexte mondial marqué par le recul de l’aide extérieure à la santé et l’urgence de renforcer la mobilisation domestique.
Alors que le continent africain continue de porter plus de 95 % des décès liés au paludisme, et que les financements internationaux se fragmentent face aux urgences globales, le leadership parlementaire devient un levier incontournable pour garantir la pérennité des progrès.
Ce Caucus parlementaire n’est pas une structure de plus. Il est le symbole d’une volonté d’agir localement pour résoudre une crise qui impacte directement la productivité, l’égalité des chances, et la stabilité économique. Le paludisme coûte à l’Afrique près de 12 milliards de dollars par an et provoque des millions de jours de travail et d’école perdus.
En dotant l’Assemblée nationale d’un cadre formel de plaidoyer, de contrôle budgétaire et de mobilisation, le Bénin crée un précédent pour la région.
« Ce Caucus incarne notre volonté d’agir, de mobiliser et de transformer durablement la lutte contre le paludisme en une véritable priorité politique, budgétaire et sociale. » – Hon. Barthélémy Kassa, Premier Vice-Président de l’Assemblée nationale.
Grâce à une approche multisectorielle et à la campagne « Zéro Palu ! Je m’engage », le budget national alloué à la lutte contre le paludisme est passé de 1 milliard FCFA entre 2020 et 2022 à près de 4 milliards FCFA en 2025. Ce bond budgétaire témoigne d’un alignement politique inédit entre exécutif, parlement et partenaires.
Des mesures innovantes, comme la création du Fonds Zéro Palu, renforcent cette dynamique en institutionnalisant des mécanismes de financement durable basés sur des partenariats public-privé. L’impact est mesurable : l’incidence du paludisme est passée de 21 % en 2022 à 13 % en 2024, et le vaccin antipaludique a été introduit en avril 2024, marquant une nouvelle phase de protection pour les enfants.
« En créant ce Caucus, nous affirmons notre volonté d’agir de manière concertée, ambitieuse et durable. Ce cadre parlementaire stratégique permettra de renforcer notre plaidoyer, d’accroître les financements domestiques, et de faire du paludisme une priorité nationale constante. »
– Hon. Constant Nahum, Coordonnateur du Réseau des parlementaires béninois Réseau des parlementaires béninois pour la lutte contre le VIH/SIDA, le tabagisme, la tuberculose, le paludisme et l’élimination de l’hépatite.
Le Plan triennal 2025-2028 adopté par le Caucus définit des missions structurantes : plaidoyer budgétaire, suivi des politiques publiques, renforcement des coopérations intersectorielles et mobilisation communautaire. Il offre un cadre de redevabilité et d’action continue, essentiel pour ne pas dépendre uniquement de financements extérieurs.
Un modèle de leadership parlementaire pour l’Afrique
Comme l’a souligné Fara Ndiaye, Directrice exécutive adjointe de Speak Up Africa :
« L’élimination du paludisme n’est pas seulement une priorité sanitaire, c’est un enjeu de souveraineté, de justice sociale et de développement durable. Le lancement de ce Caucus parlementaire marque une nouvelle ère de leadership politique et de redevabilité. Chez Speak Up Africa, nous sommes fiers d’accompagner ce pas audacieux et nécessaire vers un Bénin et une Afrique sans paludisme. »
Et le Ministre de la Santé, Pr Benjamin I. B. Hounkpatin, d’ajouter :
« Le Bénin reste confronté à des impacts économiques et sociaux liés au paludisme : absentéisme, perte de productivité, surcharge du système de santé, échecs scolaires. Ce Caucus est un cadre stratégique pour inverser cette tendance. »
« Les défis restent nombreux, mais les fondations sont solides, la vision est claire, et la volonté politique est manifeste. Le Caucus est une opportunité historique pour faire du paludisme une cause nationale, portée par des leaders légitimes, proches des communautés. » – Dr Jean Konan Kouamé, Représentant de l’OMS au Bénin.
Le succès de ce modèle dépendra de la continuité politique, de l’intégration dans les processus budgétaires annuels, et d’une appropriation collective par les parlementaires de tous bords. Il ne s’agit plus de dépendre des bailleurs, mais d’assumer une responsabilité nationale souveraine et durable.
Le Bénin ouvre la voie. Il appartient maintenant à d’autres pays de la région de s’en inspirer.
Par Franz Okey, Conseiller régional à Speak Up Africa.