11 décembre 2020
Professeur Awa Marie Coll-Seck, Présidente du Comité scientifique du Forum Galien Afrique
Cette année, le monde a été confronté à un ennemi commun, des pays de toutes tailles et de toutes démographies s'étant enfermés dans la lutte contre le coronavirus. Alors que le continent africain a connu de nombreuses épidémies et travaille sans relâche pour vaincre des ennemis de longue date tels que le paludisme, la tuberculose et le VIH/SIDA, même nous n'étions pas à l'abri des effets de la pandémie de COVID-19. À ce jour, nous avons enregistré près de 2 millions de cas et 45 000 décès, et la menace est loin d'être écartée.
" Cette année, la pandémie de COVID-19 nous a montré la nécessité de disposer d'informations scientifiques factuelles et fiables. Alors que l'Afrique supporte près de 20 % de la charge mondiale de morbidité, notre production scientifique représente moins de 1 % de la part mondiale".
Malgré ce danger, la réponse de l'Afrique a été puissante. Il était essentiel de réagir rapidement, et nous pouvons être fiers de la rapidité avec laquelle l'Union africaine, l'Organisation mondiale de la santé, les dirigeants nationaux, les organisations internationales et la société civile travaillant sur le terrain, les scientifiques et les communautés ont réagi à cet ennemi émergent. Les scientifiques ont travaillé d'arrache-pied pour communiquer des informations sur ce nouveau virus inconnu, mais nous sommes en proie à un autre grand virus, celui de la désinformation. Ce problème fait reculer notre mission de santé publique, car des informations inexactes et des mythes circulent en ligne et au sein des communautés. La communication d'informations crédibles et exactes est donc d'autant plus cruciale pour protéger notre continent.
Cette question n'était toutefois pas nouvelle pour le COVID-19, car on peut en dire autant des programmes d'immunisation ou des traitements préventifs contre le paludisme. Notre continent a longtemps souffert d'une méfiance à l'égard de la recherche médicale occidentale, beaucoup considérant les vaccins comme potentiellement nocifs. La réalité est tout autre. Combien de maladies infectieuses comme la coqueluche, la diphtérie ou encore la rougeole sont devenues rares, voire exceptionnelles dans de nombreux pays africains grâce à la vaccination ? En fait, les innovations de ces dernières années dans le domaine de la recherche médicale ont permis d'obtenir des résultats incroyables en matière de santé publique, la prévention et le traitement de nombreux problèmes de santé publique constituant les fondements de nos systèmes de santé solides.
Cette année, la pandémie de COVID-19 nous a montré la nécessité de disposer d'informations scientifiques factuelles et fiables. Alors que l'Afrique supporte près de 20 % de la charge mondiale de morbidité, notre production scientifique représente moins de 1 % de la part mondiale. Cette situation doit changer ! Depuis que j'ai obtenu mon diplôme de médecine à l'université de Dakar, il y a de nombreuses années, j'ai eu le grand honneur d'être l'auteur de plus de 150 publications scientifiques sur des sujets tels que le paludisme, la rougeole, le tétanos, la typhoïde, le sida et les maladies cardiovasculaires, en suivant les traces de nos professeurs renommés. De nombreuses générations ont fait mieux encore, mais ce n'est pas encore suffisant ! Ayant été ministre de la santé du Sénégal à deux reprises, je comprends l'importance pour les scientifiques et les professionnels de la santé africains de forger des partenariats Nord-Sud, mais surtout de travailler ensemble pour relever nos plus grands défis en matière de santé. Néanmoins, nos gouvernements et le secteur privé africain doivent soutenir et financer la recherche scientifique. Si nous ne le faisons pas, nous n'atteindrons pas notre objectif.
Et il y a de quoi se réjouir. Partout sur le continent, d'excellents scientifiques travaillent sur de nouvelles innovations passionnantes afin d'améliorer considérablement la santé publique. Le3e Forum Galien Afrique réunira un grand nombre de scientifiques de renom et certains des jeunes étudiants les plus méritants du 8 au11 décembre 2020 pour discuter de leurs recherches et de leurs travaux novateurs dans le domaine des soins de santé. En veillant à ce que les communautés à travers l'Afrique aient accès à des informations et des innovations précises et potentiellement salvatrices, nous serons en mesure de poursuivre nos progrès dans la lutte pour une société plus juste et plus prospère, libérée du fardeau de la maladie grâce à un système de santé résilient.
Ce ne sont pas seulement les scientifiques d'aujourd'hui que nous devons encourager, mais aussi nos futurs talents, en particulier les jeunes femmes, car moins de 30 % des chercheurs dans le monde sont des femmes. Je crois fermement à l'immense pouvoir des jeunes en tant qu'acteurs du changement, innovateurs et leaders. L'Afrique a la population la plus jeune de la planète et, d'ici à 2050, la population des jeunes africains augmentera de près de 50 %, ce qui peut constituer une incroyable opportunité de transformation sociale, économique et scientifique rapide. Pour aider les jeunes entrepreneurs à innover dans le domaine de la santé et à devenir des acteurs du changement, je suis fier, en tant que président du comité scientifique du Forum Galien, de participer au lancement des Africa Young Innovators for Health Awards 2021, qui viseront à soutenir les jeunes entrepreneurs africains qui travaillent activement au développement de solutions innovantes visant à soutenir les stratégies mises en place par les travailleurs de la santé dans le cadre d'une approche communautaire et pluridisciplinaire.
Notre continent a beaucoup à offrir dans la lutte contre les menaces existantes et émergentes. Nos scientifiques sont talentueux, innovants et extrêmement dévoués pour nous aider à vaincre toute une série d'ennemis. Il est essentiel que nous nourrissions et investissions dans les esprits les plus brillants d'Afrique, car lorsqu'ils bénéficient d'un soutien approprié, les scientifiques africains peuvent façonner le programme de recherche du continent et contribuer à résoudre les problèmes de santé les plus urgents du monde.