Les organisations de la société civile sénégalaise : le chaînon manquant dans la lutte contre les MTN

Les organisations de la société civile sénégalaise : le chaînon manquant dans la lutte contre les MTN

Yacine Djibo, fondateur et directeur exécutif de Speak Up Africa

Les organisations de la société civile (OSC) sont un aspect crucial de la société sénégalaise, car elles servent de pont entre la population et la politique, ainsi que de catalyseur pour la santé publique. Nous avons déjà vu le pouvoir que détient la société civile pour faire avancer le changement, et nombre d'entre elles gagnent aujourd'hui leur place dans les discussions de haut niveau sur la santé. Les OSC peuvent concentrer leurs efforts sur de nombreuses initiatives, mais peu d'entre elles ont une portée aussi large que les maladies tropicales négligées (MTN). Les MTN, un groupe d'environ 20 maladies, touchent plus d'un milliard de personnes dans le monde, mais ne reçoivent que 0,6 % du financement mondial. Avec 79% des pays africains coendémiques pour au moins 5 de ces maladies, il y a clairement beaucoup de travail à faire, et les OSC peuvent jouer un rôle important en raison de leur proximité avec la communauté et de leurs compétences en matière de plaidoyer.

Les OSC ont défendu et continuent de défendre les intérêts des parties prenantes et de leur demander des comptes pour obtenir de meilleurs résultats en matière de santé, mais, comme c'est souvent le cas, ces organisations sont plus fortes ensemble. C'est pourquoi la création d'une communauté dédiée à la lutte contre les MTN est essentielle à leur élimination. Les coalitions telles que le réseau de la société civile "Non aux MTN" permettent aux organisations de mettre en commun leurs ressources et de maximiser l'impact de leurs efforts. Au Sénégal, des organisations se sont réunies pour partager leurs connaissances dans la lutte contre les MTN, notamment l'Alliance nationale des jeunes pour la santé de la reproduction et la planification familiale (ANJ/SRPF), Environnement, Communautés, Santé et Sécurité (ECOSS) et l'Initiative Hope for African Children (HACI). L'ANJ/SRPF se concentre sur la santé sexuelle et reproductive, ECOSS se concentre sur l'environnement et la communauté, et HACI a été créée pour relever l'énorme défi auquel sont confrontés des millions d'enfants africains touchés par le SIDA. Chacun représente une cause différente, mais les MTN peuvent toucher tout le monde et chacun a un rôle à jouer dans leur élimination. Ces différences rendent la coalition plus forte, car chacun possède un ensemble unique d'expériences et a surmonté des défis différents.

En combinant leur expertise, ces OSC ont utilisé leur portée et leur influence pour travailler à l'éradication des MTN et protéger leurs concitoyens. Chaque OSC a travaillé différemment, en complétant ses capacités et son influence pour s'engager auprès de tous. ANJ/SRPF a organisé une série d'ateliers pour les fonctionnaires qui ont permis aux politiciens de signer des engagements importants pour lutter contre les MTN. Les dirigeants communautaires et les élus ont le devoir de protéger leur population et, grâce au travail de l'ANJ/SRPF, ils ont fait un pas de plus vers la réalisation de cet objectif. Entre-temps, HACI a travaillé avec d'autres OSC, engageant 90 dirigeants de la société civile pour garantir la mise en place de programmes de lutte contre les MTN. Des articles ont ainsi été rédigés, des déclarations ont été signées et le nombre de personnes engagées dans la lutte contre les MTN a augmenté.

Ce ne sont là que deux éléments où les OSC jouent un rôle central dans la lutte pour le contrôle et l'élimination des MTN. Les médias sont également un facteur clé ; les journalistes demandent des comptes aux dirigeants et diffusent des informations au public. Dans le but de mieux faire comprendre les MTN et la manière dont elles peuvent être éliminées, ECOSS s'est adressé aux stations de radio pour s'assurer que le message de la coalition atteignait tout le monde. Ces trois OSC ont ensuite pu travailler ensemble pour s'assurer qu'elles atteignaient ceux qui avaient besoin de soutien.  


Cependant, il reste encore beaucoup à faire. En 2018, au Sénégal, 1 personne sur 5 n'a pas reçu le traitement dont elle avait besoin. Le traitement de masse pour l'élimination des MTN coûte généralement moins de 0,50 USD par personne. C'est un petit prix à payer si l'on considère les dommages à vie qu'une ATN peut causer à la fois à la personne touchée et à la communauté dans son ensemble.


Les MTN peuvent entraîner la cécité et la défiguration, et chez les enfants, elles augmentent la probabilité de malnutrition, de troubles cognitifs ou de retard de croissance. Les personnes souffrant d'une ATN sont moins susceptibles d'aller à l'école et de participer activement à la vie de la communauté. Souvent incomprises, les personnes atteintes d'une ATN peuvent être rejetées par leur entourage, ce qui contribue à les isoler davantage. Grâce au réseau de la société civile "Non aux MTN", tous les acteurs, des décideurs politiques au grand public, sont davantage impliqués dans l'élimination de ces maladies. Le réseau offre aux OSC, à tous les niveaux, une plateforme de consultation et de collaboration en vue de maximiser l'impact de leurs efforts, en particulier en ce qui concerne le renforcement de la responsabilité pour un financement durable accru des programmes de lutte contre les MTN.

Une meilleure harmonisation et intégration des OSC dans le domaine de la santé permettra d'améliorer plus rapidement les résultats sanitaires nationaux et régionaux.

En veillant à ce que les systèmes de santé soient solides, nous serons en mesure de soutenir notre population au fur et à mesure de sa croissance, qui à son tour soutiendra notre pays. Avec un milliard de personnes souffrant d'une MTN dans le monde, il peut être difficile d'imaginer un monde sans maladies, mais c'est possible. Après tout, travailler contre vents et marées pour améliorer les conditions de vie des gens est exactement ce que font les OSC.