Une action solidaire : résister à une nouvelle menace et vaincre un vieil ennemi

Opinion • 06 July 2020

Par Son Excellence, Mme Rebecca Akufo-Addo, Première Dame du Ghana

Le 25 avril 2020, j’étais aux côtés des hommes et femmes du Programme national de lutte contre le paludisme et du Service de santé publique du Ghana pour commémorer la Journée mondiale de lutte contre le paludisme. Cette année, le thème officiel était « Zéro palu ! Je m’engage ». C’est également le slogan de la campagne éponyme dont j’ai contribué à lancer il y a un an.

Toute discussion sur des questions de santé publique doit aujourd’hui commencer par reconnaitre la nouvelle et grandissante menace de la COVID-19. Nos concitoyens ghanéens et africains craignent, à juste titre, que nos systèmes de santé soient débordés si la propagation du virus venait à échapper à tout contrôle. En outre, les répercussions indirectes de la COVID-19 sont potentiellement désastreuses pour la santé publique et menacent les avancées réalisées dans la lutte contre le paludisme au cours de ces 20 dernières années. 

Des épidémies passées avaient déjà perturbé les services de santé et réduit nos capacités à soigner d’autres maladies comme le paludisme. Ainsi, l’épidémie d’Ebola de 2014-2016 en Guinée, au Liberia et en Sierra Leone a entraîné une augmentation massive des maladies et des décès liés à cette maladie. On estime à 3,5 millions le nombre de cas supplémentaires non traités et à 10 900 le nombre de décès supplémentaires dus au paludisme dans ces trois pays, suite à la réduction de la couverture sanitaire due à l’épidémie d’Ebola. Individus, communautés, gouvernements, société civile, médias, entreprises et communauté internationale – c’est à nous qu’il revient de faire tout notre possible pour empêcher que cela ne se reproduise. Nous devons maintenir nos engagements pour une Afrique sans paludisme, malgré les défis importants qu’implique la lutte contre cette nouvelle épidémie.

Grâce à la Fondation Infanta Malaria Prevention, à la Fondation Rebecca et à mon rôle de Première Dame du Ghana, j’ai pu plaider pour de meilleures conditions de santé pour les plus vulnérables qui sont disproportionnellement touchés par le paludisme : les personnes en situation précaire, les femmes enceintes et les enfants de moins de 5 ans.

En 2018, on estime que les enfants de moins de 5 ans représentaient 67 % (272 000) des 405 000 décès dus au paludisme à travers le monde. Avant même que l’épidémie de la COVID-19 ne frappe, le paludisme était la cause de 10 000 décès maternels chaque année, 11 millions de femmes enceintes en Afrique subsaharienne ayant été infectées par cette maladie rien qu’en 2018. Le paludisme pendant la grossesse est à l’origine de 11 % des décès de nouveau-nés et 20 % des enfants mort-nés.

À ma grande consternation, entre janvier et mars 2020, sur les 95 % des 2 346 677 cas suspectés de paludisme testés au Ghana, 1 001 070 ont été confirmés positifs au paludisme. Ce nombre comprenait 21 201 enfants de moins de cinq ans et 28 764 femmes enceintes. Là encore, 42 % des 58 775 admissions pour cause de paludisme concernaient des enfants de moins de cinq ans. Sur cette période le pays a enregistré 54 décès dus au paludisme, dont 16 enfants de moins de cinq ans. Cela montre que le paludisme ne respecte pas la quarantaine mise en place pour contenir la COVID-19. La maladie continue de faire des ravages.

Ces statistiques sont inacceptables. Il est évident que ces groupes vulnérables souffriront le plus. Nous devons donc renforcer les solutions pour les protéger.

Et des solutions existent pour protéger ces populations vulnérables. Par exemple, les décès maternels et néonatals peuvent être évités grâce à une intervention simple et rentable connue sous le nom de traitement préventif intermittent pour les femmes enceintes (TPIp) à la sulfadoxine pyriméthamine (SP), administré dans le cadre des soins prénatals de routine ou suite à un diagnostic rapide et efficace des cas suspects de fièvre et de paludisme.

La pandémie de la COVID-19 pourrait nous faire oublier la maladie mortelle qu’est le paludisme et faire reculer les progrès réalisés au fil des années pour s’en protéger, tant individuellement que collectivement. Il est crucial de soutenir les efforts du Ministère de la Santé et de ses partenaires pour prévenir, détecter et traiter le paludisme. 

C’est pourquoi, en partenariat avec nos partenaires internationaux dans la lutte contre le paludisme, je demande que les actions suivantes soient menées à court et long terme.

Premièrement, que les secteurs public et privé investissent pour renforcer les systèmes de santé. Ce sont ces systèmes qui nous permettront de résister aux menaces existantes, notamment au paludisme, ainsi qu’aux nouvelles menaces comme la COVID-19. Deuxièmement, nous devons maintenir nos investissements dans des interventions vitales contre le paludisme, en particulier les moustiquaires, la pulvérisation intradomiciliaire d’insecticides à effet rémanent, la chimioprévention du paludisme saisonnier et le traitement préventif intermittent – des mesures qui sauvent des centaines de milliers de vies chaque année. Troisièmement, nous devons nous efforcer de combler le déficit de 2 milliards de dollars de financement annuel de ces interventions contre le paludisme en augmentant le financement public, ainsi que les mécanismes de financement public-privé innovants tels que les fonds et les fondations de lutte contre le paludisme. Un financement accru est essentiel pour déployer à grande échelle les solutions qui protégeront les plus vulnérables dans nos sociétés. Je sais que la pandémie de la COVID-19 mobilise beaucoup de ressources, mais nous devons également poursuivre la lutte contre les maladies mortelles existantes.

Ces deux dernières années, le mouvement panafricain « Zéro Palu ! Je m’engage » a maintenu le paludisme en haut de l’agenda politique, tout en promouvant une approche multisectorielle de la lutte contre la maladie. Ce n’est qu’avec les efforts conjoints de tous les secteurs de la société que nous pourrons atteindre l’objectif ambitieux d’en finir avec le paludisme. Depuis que les 55 chefs d’État de l’Union africaine ont exprimé leur soutien au mouvement en juillet 2018, « Zéro Palu ! Je m’engage » a pris de l’ampleur et 15 pays ont d’ores et déjà officiellement lancé leurs campagnes nationales. Au Ghana, nous œuvrons pour renforcer la volonté politique, garantir l’utilisation efficace des fonds existants et accroître le soutien du secteur privé et l’engagement des médias afin d’être en mesure d’en finir avec le paludisme lors de cette décennie.

Cette mission ne doit pas être mise en péril par l’épidémie de la COVID-19. En tant qu’africains, nous sommes connus pour notre sens de la solidarité. Individuellement et collectivement, nous pouvons tous contribuer à la résistance contre cette nouvelle menace et à vaincre un vieil ennemi – le paludisme. À l’issue de cette Journée mondiale de lutte contre le paludisme, j’encourage tout un chacun à se joindre au mouvement « Zéro Palu ! Je m’engage » pour agir en solidarité avec nos frères et sœurs en cette période d’incertitude accrue.

L’objectif « zéro paludisme » est réalisable par l’engagement de tous et la collaboration. Cela nécessite un effort à la fois individuel et collectif.Zéro Palu ! Je m’engage, rejoignez-moi pour une Afrique sans paludisme !

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